Dans le sixième arrondissement de Paris, une plaque commémorative rappelle que le 11 novembre 1940 des lycéens, des étudiants, des enseignants, des parents d’élèves, des anciens combattants ont osé manifester le jour de l’Armistice au pied de l’Arc de Triomphe et ont ainsi participé à ce qui fut l’une des premières manifestations collectives de résistance à l’occupant. La répression par la Wehrmacht fit une centaine d’arrestations et quelques blessés.
La date du 11 novembre qui fut d’abord célébration de la victoire et hommage aux morts devint donc subversive pendant l’occupation nazie où l’esprit républicain impliquait que la conscience devait parfois savoir reconnaître le devoir de désobéir.
Le 11 novembre n’est pas seulement le souvenir de la personne des morts au combat. Le sens a changé avec le temps. Après la guerre, et avec la construction européenne, ce fut le thème de la paix et du refus de la guerre en Europe qui était le discours dominant entendu au pied des monuments aux morts.
J’étais présent comme nombre de bayonnaises et bayonnais au pied de notre monument aux morts si caractéristique le 11 novembre dernier. Je participe régulièrement à cette commémoration depuis que je suis élu en 2008. Depuis ma jeunesse, je reconnais ne pas avoir toujours été assidu à ce rassemblement. J’étais présent enfant aux côtés de nos instituteurs et nous égrenions la liste des morts du villlage où j’habitais alors. J’ai même défilé un onze novembre en tant que soldat du contingent (pas forcément le meilleur souvenir).
Cette décision, comme souvent avec Nicolas Sarkozy, est totalement unilatérale. Cette décision a été prise sans que la société française, les parlementaires, les associations d’anciens combattants ou de victimes de guerre ne soient consultés.
Comme à son habitude, Nicolas Sarkozy a une forte attirance pour tout ce qui vient d’outre-Atlantique. Il veut mettre en place, comme aux Etats-Unis, un jour de la mémoire pour tous les morts pour la patrie. En clair, un « Memorial Day » à la française. Pourtant, nos histoires et nos cultures sont fondamentalement différentes.
Encore une fois, le président Sarkozy veut faire primer l’émotion comme base de communication. Souvenons-nous de la regrettable affaire de la lettre de Guy Môquet. Sa proposition de « donner » la mémoire d'un enfant victime de la Shoah à chaque écolier du CM2 était également du même acabit.
La proposition sarkozyste est nullement conforme à l’intérêt de l’histoire et donc à celui des peuples de France et d’‘Europe en mêlant indistinctement tous les champs de batailles en affirmant que toutes les guerres se valent.
Malgré le respect et la fraternité que l’on doit à nos compatriotes tombés en Indochine ou lors des guerres coloniales passées et actuelles, mourir à Verdun ou au Chemin des Dames ne revêt pas le même sens que mourir à Dien Bien Phu, à Suez ou en Kapisa.
Si l’on commémore le 11 novembre 1918, c’est non seulement pour se souvenir de faits et d’événements importants mais surtout pour les comprendre. Ce n’est pas seulement un devoir envers les morts que nous accomplissons mais surtout un acte d’éducation populaire en forme de message universel en direction des vivants.
Nicolas Sarkozy est-il en mesure d’appréhender cette différence ?
Personnellement, j’en doute ….